Claire Moeder est une artiste et travailleuse culturelle établie à Maria depuis quelques années. Elle vient de publier aux éditions du Noroît Le ventre des roches, un recueil où s’entrelacent poèmes et photographies et qui racontent l’histoire d’une lignée de femmes campée sur les berges gaspésiennes.
Claire, parle-nous un peu de toi ! Qu’est-ce qui t’a amené à Maria ?
J’ai une pratique d’écriture depuis que je suis enfant et j’ai développé une pratique de critique d’art dans le milieu des arts visuels. Française d’origine, j’ai étudié là-bas, puis j’ai commencé mon parcours en arts visuels à Montréal mais j’ai eu (et j’ai encore) l’occasion de me déplacer pas mal. J’ai eu le désir de sortir de la ville. En étant expatriée, on n’a pas forcément la même manière de s’enraciner, donc je savais que le déplacement en région était possible et facile. Je ne peux pas dire que je pensais aller en Gaspésie ou à Maria spécifiquement, mais c’est plutôt une histoire de rencontres et occasions professionnelles qui m’ont amenée ici.
Photo : La Nomade photographie
Est-ce que tu as sauté le pas tout de suite pour emménager ici ?
Non, j’ai commencé à tisser des relations artistiques dans la communauté petit à petit. Au début, en 2015, je restais encore à Montréal et je me déplaçais fréquemment pour des mandats en Gaspésie. Ça été comme une expérience empirique. Je testais le mode de vie sur le territoire et je voyais comment je réagissais à ce mode de vie. J’ai collaboré plusieurs fois avec l’artiste Maryse Goudreau lors de ses projets artistiques (Festival du Tank à Escuminac). J’ai ensuite réalisé un mandat avec Les Rencontres internationales de la photographie en Gaspésie. Ces expériences m’ont permis de découvrir aussi des modèles d’artistes et travailleur.euses culturelles qui partageaient leur temps entre la ville et la vie en région. Tranquillement, j’ai tricoté mon réseau professionnel, amical et personnel et j’ai rapidement glissé vers la vie à plein temps en Gaspésie.
Qu’est-ce qui t’a fait choisir la vie en région ?
Pour moi, arriver ici c’était vraiment quelque chose de différent par rapport à mes repères de l’Est de la France, le paysage maritime ne faisait pas du tout partie de mon passif. Je n’avais pas l’impression de retrouver quelque chose que je connaissais. J’ai fait un projet de recherche sur l’érosion côtière, il y a quelques années et ça m’a fait rencontrer la communauté et questionner leur rapport au territoire. D’une certaine manière, ça m’a amenée à découvrir que mon attachement au territoire était très fort.
Le point de bascule, ça été de vivre l’hiver complet et surtout la saisonnalité ici. Je pouvais vivre le cours des saisons et m’adapter à l’offre culturelle et au rythme de travail en fonction des saisons. Je me considère comme saisonnière et ma vie est teintée de chaque moment de l’année, de ce que ça donne et prend comme temps.
J’ai eu accès aussi à beaucoup de services, notamment pour la famille. Je pense par exemple aux services de soutien aux parents et Sage-femme. J’ai aussi développé un beau maillage social. Il y a plein de choses que je considère précieuses ici et je pense que je n’y aurais pas eu accès ailleurs qui font partie des choses présentes et accessibles dans la Baie-des-Chaleurs.
Photo du sentier du Grand Sault : Claire Moeder
Décris-moi ton mode de vie
Je n’ai pas de prétention maraîchère, mais ma journée commence en prenant soin de mon jardin et en ayant ce contact concret avec la nature. J’aime entremêler des choses pragmatiques avec celles plus cérébrales ou administratives.
Dans ma démarche d’écriture, une grande partie de la recherche et de la création se fait en lien avec la nature. Actuellement, j’ai un projet d’écriture de randonnée qui implique donc des déplacements et une immersion dans un contexte particulier. Cette manière de faire me permet de me connecter avec le territoire gaspésien autour de moi et en permanence, au niveau personnel et professionnel. Vivre à Maria, ça vient avec une sorte de lenteur propice à la création. J’aime l’effervescence artistique de la ville, mais j’aime aussi le fait de pouvoir faire de la place dans ma vie et à ce qui nourrit ma création.
Photo : quatrième de la couverture du recueil «Le ventre des roches»
tu connais bien le territoire, peux-tu nous dire quels sont tes coups de cœur ?
Maria au complet est quasiment mon atelier ! À choisir, j’aime particulièrement le sentier du grand Sault où je vais régulièrement faire des sessions d’écriture et m’immerger dans la forêt.
J’ai un attachement sensible aux dunes de Carleton-sur-Mer (le palais des hirondelles) qui fait partie du projet sur le littoral sur lequel j’ai travaillé. J’ai pris beaucoup de photos là-bas après les tempêtes et j’y retourne régulièrement. C’est un endroit fascinant, qui a quelque chose de spectaculaire mais très fragilisé par l’érosion côtière.
Crédit photos :
La Nomade Photographie (photo principale)
Claire Moeder (Dunes de Carleton)
–
T’en veux plus? Découvre l’article Pourquoi j’ai choisi Maria